Aller au contenu

Page:Goncourt - Pages retrouvées, 1886.djvu/14

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

astreints à la production, toujours égale, à heure, toujours fixe, — qui sentez, dans cette perpétuelle action, sans cesse renouvelée, votre être physique s’exalter, votre verve fuir comme une eau courante, la source de votre cerveau se renouveler comme par des afflux de fièvre ;

Journalistes qui vous désespérez de ne pouvoir faire œuvre qui dure, et qui, sur chaque feuille que vous noircissez, vous efforcez à mettre un peu du frissonnement des belles phrases, un peu de la sérénité des idées, — voici deux écrivains qui se sont réclamés de votre labeur sans avenir, de votre essai de chaque jour, et qui viennent, par ce livre, marquer leur place parmi vous.

Ils ont eu des débuts dans ces feuilles qu’un jour fait naître et qu’un jour fane ; ils ont corrigé une rapide écriture sur des épreuves humides, ayant encore l’âpre parfum de l’encre d’imprimerie. Ils ont envoyé de la grâce et de l’imagination, du sentiment et de l’ironie, à l’adresse du lecteur distrait, dont le regard vague saute les lignes essentielles. Ils ont avoué des mépris et des sympathies, des haines et des admirations. Ils ont mis des opinions au-dessus de leur signature. Ils ont marqué, dès leurs premiers mots, leur volonté