Page:Gondal - Mahomet et son oeuvre.djvu/11

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tous à sa table. Dans une de ces fêtes intimes, le Prophète, après avoir exposé ses espérances et annoncé son dessein de se lancer éperdument à la réalisation de son rêve, — « qui de vous, s’écria-t-il, veut être mon frère, mon lieutenant, mon vizir ? » « Apôtre de Dieu, répondit Ali, je serai celui-là, et si quelqu’un te résiste, je lui briserai les dents, je lui arracherai les yeux, je lui fendrai le ventre et je lui casserai les jambes. »

À partir de ce jour, les partisans de Mahomet se livrent en public à un prosélytisme de jour en jour plus audacieux : les prières nouvelles sont récitées publiquement à la Kaaba ; la nouvelle doctrine prêchée avec éclat aux fêtes de la vallée d’Okhad ; le culte des idoles est violemment attaqué. La famille des Koréïschites, directement intéressée au maintien du culte idolâtrique, s’émeut d’une entreprise qui menace son autorité religieuse et politique, et provoque contre les musulmans une insurrection qui aurait mal tourné pour le Prophète, sans l’intervention d’Abou-Taleb et des autres membres de sa famille. Ceux-ci, bien que ne partageant pas toutes les idées de leur parent, jurèrent unanimement de le défendre, par esprit de famille, et par point d’honneur. « Vous mentez, s’écriait Abou-Taleb, dans une pièce en vers adressée aux Koréïschites, j’en jure par le saint Temple, si vous dites que nous laisserons verser le sang de Mahomet, sans avoir combattu avec la lance et l’épée ».


le Fugitif.


La courageuse attitude des parents du Prophète ne fit qu’exaspérer la colère jalouse des Koréïschites. Si terribles furent les imprécations, si violentes les