et de s’y être subordonné toujours et partout, même dans ses plus extrêmes fantaisies, et Dieu sait si son imagination en est prodigue !
Aussi dois-je affirmer, au seuil de cet ouvrage, que mon but n’a pas été de pousser à l’imitation, à la copie de conceptions artistiques qui sont aux antipodes des nôtres, qui répondent aux habitudes, aux instincts d’une autre race et d’un autre milieu social. Je m’élève même avec la plus vive énergie contre l’abus qui a été fait récemment par nos artistes décorateurs du pastiche japonais. C’est une grave erreur que d’emprunter, en les répétant servilement, des formes et des décors qui sont le langage dessiné d’un peuple. Que signifient chez nous ces fleurs de prunier sauvage, ces grues, ces bambous que nous imprimons sur nos papiers, que nous gravons sur nos meubles, que nous ciselons sur nos bijoux, ou que nous peignons dans le fond de nos assiettes ? J’admets la copie des décors japonais comme une exception, un caprice piquant ; mais encore faudrait-il choisir à bonne source des motifs d’un style pur, et ne pas prendre à l’aventure, sur des objets modernes et de fabrication courante, des dessins qui n’ont plus guère de japonais que le nom.
Ce que je souhaite, au contraire, ce que j’appelle de tous mes vœux, en présence de l’appauvrissement de notre invention décorative, de la perversion de notre sens optique, c’est que nos dessinateurs industriels apprennent de ces Orientaux, que nous avons si longtemps traités de barbares, à aimer le naturel et la vérité, comme l’aimaient, d’ailleurs, nos ancêtres du moyen âge ; c’est que l’étude de l’art japonais des belles époques les conduise à en dégager les principes féconds, les saines doctrines, leur inspire un peu de cette passion de la nature, de cette religion du travail qui éclatent dans toutes les œuvres du Nippon, les rende plus sensibles aux lois harmoniques de la couleur, les dégage des formules routinières de la symétrie, leur révèle la valeur topique de la synthèse et de la simplification en matière de décor. Puisons à pleines mains dans notre
