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OBLOMOFF.

entrait dans un bateau avec l’espoir, mais vague, d’aborder sans encombre à l’autre rive ; s’il était en voiture, il s’attendait à voir les chevaux s’emporter et le renverser ; ou bien il était pris d’une terreur nerveuse : il s’effrayait du silence qui l’entourait, ou tout simplement, sans qu’il sût pourquoi, des frissons commençaient à lui courir par le corps.

Quelquefois il jetait un regard craintif sur un coin obscur, s’attendant à ce que son imagination lui jouât quelque tour et lui évoquât une vision surnaturelle.

C’est ainsi qu’il traversa la société et abandonna paresseusement toutes les illusions juvéniles qui l’avaient trompé, et auxquelles lui-même avait failli, tous les souvenirs tendres, mélancoliques, brillants qui parfois, même au déclin de l’âge, font battre le cœur des autres hommes.


VI


Que fait-il donc chez lui ? Est-ce qu’il lit ou écrit ou étudie ? Oui, s’il lui tombe sous la main un livre, un journal, il le lit. S’il entend parler d’une œuvre remarquable, l’envie lui vient de la connaître : il cherche, il demande le livre et, si on ne tarde pas trop à le lui apporter, il se met à le lire ; il commence