Page:Gorki - Ma Vie d’enfant.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

au milieu du fleuve tout encombré d’embarcations, hérissé de mâts pointus, une grande barque pleine de gens nous accosta ; on leur tendit une échelle et, l’un après l’autre, les occupants du canot grimpèrent sur le pont. Le premier que j’aperçus fut un petit vieillard sec et vif qui se distinguait par son long vêtement noir, sa barbiche roussâtre et comme dorée, dominée par un nez aquilin au-dessus duquel luisaient deux petits yeux verts.

— Papa ! s’exclama ma mère, d’une voix à la fois sourde et forte, et elle se précipita vers lui ; il lui prit la tête et lui caressa les joues de ses petites mains rouges, puis se mit à crier et à glapir :

— Eh bien ! Ah ! Ah ! nous voilà !

Grand’mère embrassait et étreignait tout le monde à la fois, semblait-il ; elle tournait comme une toupie ; elle me poussa vers des gens inconnus, en m’expliquant très vite :

— Allons, dépêche-toi ! Voilà l’oncle Mikhaïl, c’est Jacob… La tante Nathalia ; tes cousins, ils s’appellent Sachka et Sacha, leur sœur Catherine ; tout cela, c’est notre famille, nous sommes nombreux, n’est-ce pas ?

Le grand-père lui demanda :

— Et tu es en bonne santé, mère ?

Ils s’embrassèrent à trois reprises.

Puis le grand-père, me tirant d’un groupe compact, me demanda, la main posée sur la tête :

— Qui es-tu ?

— Un petit d’Astrakhan… un passager des cabines…

— Que raconte-t-il ? s’étonna l’aïeul en s’adressant