et portant lunettes, vêtu d’un uniforme, et beaucoup d’autres encore ; tous restaient immobiles, comme des statues de bois ; ils attendaient et écoutaient l’eau qui clapotait tout près de nous. Appuyé au montant de la porte, l’oncle Jacob debout cachait ses mains dans ses poches. Grand-père l’appela :
— Conduis ce gamin à son lit !
L’oncle me fit signe du doigt et s’en alla sur la pointe du pied jusqu’à la porte de la chambre de grand-père ; lorsque j’eus grimpé sur le lit, il chuchota :
— La tante Nathalie est morte !
Je n’en fus pas surpris ; depuis longtemps, elle menait dans la maison une vie tellement à part, ne paraissant plus à la cuisine, ni à table.
— Où est grand’mère ?
— Là-bas, répondit l’oncle, avec un petit geste vague, et il sortit toujours sur la pointe des pieds.
Je demeurai couché à regarder tout ce qui m’entourait. Aux vitres s’étaient collés je ne sais quels visages velus, gris et aveugles. Dans un coin, au-dessus d’une malle, à l’endroit où grand’mère suspendait ses robes, il me semblait que quelqu’un guettait. Le visage enfoui dans l’oreiller, je louchai d’un œil vers la porte ; j’avais grande envie de repousser mon édredon et de fuir. Il faisait chaud ; une odeur épaisse et suffocante emplissait l’appartement et je me remémorais le jour où Tziganok était mort ; des filets de sang coulèrent sur le sol, quelque chose se gonfla dans ma tête ou dans mon cœur ; tout ce que j’avais vu dans cette maison défilait sous mon