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tout au moins celui auquel s’arrêtent les esprits véritablement forts et rigoureusement logiques. « Athéisme, dit-il, marque de force d’esprit ; mais jusqu’à un certain degré seulement » (XXIV, 101.) — Jusqu’à quel degré ? il ne nous le dit pas, mais il est permis de supposer que c’est jusqu’au degré où le christianisme n’est point connu et n’a pas proposé ses preuves. « Le pyrrhonisme est le vrai, » ajoute-t-il (XXIV, 1). Et sur ce, il se met à exposer « les principales forces du pyrrhonisme », auxquelles « les dogmatistes sont encore à répondre depuis que le monde dure. » (VIII, 1.)

Cependant, que le pyrrhonisme ne triomphe pas de ces concessions qui lui sont faites et des victoires qu’il a remportées. Ce qui fait sa force, ce n’est pas sa vertu propre, mais bien la faiblesse des preuves que propose la raison spéculative pour établir la vérité du déisme. Ces preuves, en effet, « sont si éloignées du raisonnement des hommes, et si impliquées, qu’elles frappent peu ; et, quand cela servirait à quelques-uns, cela ne servirait que pendant l’instant qu’ils voient cette démonstration, mais une heure après, ils craignent de s’être trompés. » (X, 5). Fournir de telles preuves, les donnant comme probantes, c’est ne rien prouver, si ce n’est que la religion chrétienne, à laquelle on les veut faire servir, est bien faible et bien digne de mépris (XXII, 1). « Cette impuissance ne doit donc servir qu’à humilier la raison, qui voudrait juger de tout, mais non pas à combattre notre certitude, comme s’il n’y avait que la raison capable de nous instruire » (VIII, 6). Et quand le pyrrhonisme a vaincu Je dogmatisme sur le terrain de la spéculation, la nature survient, qui « soutient la raison impuissante » (VIII, 1), la sauve de cette suprême folie, mais en la sauvant, la con-