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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

cevaient gratuitement l’hospitalité, devoir sacré pour les Islamites. La protection donnée aux œuvres de l’esprit ne fut jamais plus éclairée et l’époque d’Al-Hhakem, dit justement M. Louis Viardot dans ses remarquables études sur les Maures d’Espagne, est une sorte de siècle d’Auguste, qui marque le point culminant de la civilisation des Arabes.

À la mort de ce khalyfe pacifique (976), Heschâm II, son fils, âgé de dix ans, hérita de la souveraineté, sous la régence du Hageb Mohammed-ben-A’mer, surnommé Al-Manssoûr, (Almanzor) l’invincible. Noble et magnifique, éclairé, austère, intrépide, esclave de sa foi, ce ministre tout puissant mérita par son gouvernement et ses succès une gloire durable. Il voulut subjuguer les Espagnols, et, après vingt années de combats incessants, il parvint à se rendre maître du comté de Castille, de Salamanque, de Zamora, d’Astorga, de Léon même, ayant refoulé les rois chrétiens au delà de l’Èbre et du Duero (997). Vers la même époque furent écrasées, par son fils Abd-el-Mélek, les tribus Berbères de l’Afrique, révoltées contre la domination des Édrysytes. Le royaume de Fez reconnut de nouveau la suzeraineté des khalyfes Ommyades. Non content de tant de triomphes, il rouvrit la campagne contre les chrétiens par le Portugal, s’empara de Coïmbre, de Lamégo, de Braga, et prit d’assaut, en Galice, la ville sainte de Saint-Jacques de Compostelle.

Les chrétiens de Castille et de Navarre, des Asturies, de Galice et de Léon, resserrés dans les étroites limites des domaines de Pélage, firent un effort désespéré. Ils descendirent vers les sources du Duero, au-devant d’Al-Manssoûr, et le rencontrèrent auprès de Calatañozor. Une bataille terrible s’engagea. Elle dura tout un jour, sans qu’il y eût victoire ou défaite. Seulement, lorsque la nuit eût suspendu le combat, le glorieux Hageb, couvert de blessures, s’aperçut que la plupart de ses lieutenants avaient péri. Dans la douleur de n’avoir point vaincu, malgré de si cruelles pertes, le héros musulman déchira les appareils qui retenaient son sang