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Page:Gosset - Histoire du Moyen-Âge, 1876.djvu/186

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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

mission des Anglo-Saxons fut assurée, il s’étudia à gagner l’affection de ses nouveaux sujets, se montra ami des moines, des prélats, et adversaire implacable de ses anciens co-religionnaires. Il confirma les lois d’Edgar et en fit rédiger de nouvelles, qu’il eut l’adresse de transgresser le premier, en tuant un soldat, pour se donner la gloire de se condamner lui-même à payer neuf fois l’amende ordinaire. Le meurtre de cet homme lui coûta, dit-on, trois cent soixante sous d’or. Par ces moyens, Kanut se fit une renommée d’inflexible impartialité. Une autre anecdote, qui n’est peut-être qu’une forme de la tradition populaire, nous fait bien connaître ce barbare civilisé. Un jour, à Southampton, voulant donner une leçon à ses courtisans qui lui attribuaient un pouvoir sans limite, il alla s’asseoir sur la plage à la marée montante et intima l’ordre à la mer qui s’avançait de respecter le bord de sa robe. Quand il eut les pieds et les genoux mouillés, il se releva et dit d’un ton sévère à la foule des flatteurs : « Reconnaissez maintenant combien est fragile la puissance d’un monarque de la terre, comparée au pouvoir de Celui qui gouverne les éléments et qui seul peut dire : Tu viendras jusqu’ici, tu n’iras pas plus loin. » Les annalistes ajoutent que Kanut quitta sa couronne après ce discours et la déposa dans la cathédrale de Winchester.

En 1019, Kanut-le-Grand se rendit dans son royaume de Danemark, qui était alors en guerre avec la Suède, accompagné d’une armée d’anglo-saxons commandée par le comte Godwin. Victorieux de ce côté, le Danois revint en Angleterre et fit encore une expédition heureuse dans le pays de Galles où s’étaient retirés les derniers débris de la race kimrique. Après un pèlerinage à Rome où il rencontra Konrad II (1027), Kanut, de retour en Danemark, recommanda le payement annuel du denier de saint Pierre et créa un impôt sur chaque feu au profit du Saint-Siége. La prodigalité de ses dons lui valut une grande réputation d’opulence et, comme il ne méprisait pas la poésie, sa cour devint le séjour des skaldes, des ménestrels et des hommes de gaie science. Après la