DOUZIÈME SIÈCLE.
n deux siècles, la féodalité n’avait pas seulement réussi à paralyser l’exercice du pouvoir royal, elle avait détruit, par surcroît,
toute indépendance municipale et anéanti
les restes de liberté individuelle qui avaient
survécu aux bouleversements de l’invasion. Les anciens
hommes libres, accablés de charges onéreuses qui rendaient leur condition peu différente de celle des serfs, se
réfugièrent dans les villes pour échapper aux vexations
des châteaux. Ils y retrouvèrent dans la personne des
comtes l’inévitable tyrannie de cette société organisée
d’après l’axiome : Point de terre sans seigneur. Les
villes avaient été assujéties comme les campagnes à des
droits de toute nature, redevances, péages, levées imprévues d’argent, ainsi qu’à l’impôt arbitraire de la taille,
impôt personnel et territorial à la fois, qui livrait au caprice du suzerain et de ses gens, vivres, meubles, chevaux, voitures, sans rétribution ni dédommagement.
Serfs ou bourgeois ne se résignèrent pas toujours à cette
sujétion. Ils se révoltèrent et furent cruellement réprimés comme il arriva, en 987, aux vilains de Normandie,
aux habitants du Mans qui formèrent par serment, en
1067, une association de résistance armée, à ceux de
Cambrai qui affirmèrent, par un siècle de luttes, leur
droit à une constitution municipale. Le mouvement
communal se propagea à Noyon, à Beauvais, à Saint-Quentin, et le tiers-état, qui venait de naître, ne tarda