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Page:Gosset - Histoire du Moyen-Âge, 1876.djvu/236

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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

enchères les plus hautes dignités, les offices les plus importants, céda pour dix mille marcs la suzeraineté sur le royaume d’Écosse, et finit par s’écrier : « Je vendrais Londres, si je pouvais trouver un acquéreur. » Lorsque Philippe-Auguste, qui avait également juré, sous l’orme de Gisors, de prendre la croix, eut terminé de son côté les préparatifs nécessaires à l’accomplissement de son vœu, les deux souverains eurent une entrevue à Gué-Saint-Rémi, au milieu de janvier (1190). Ils se jurèrent une amitié mutuelle, vouèrent celui qui se parjurerait aux anathèmes de l’Église, et arrêtèrent le rendez-vous général pour la Saint-Jean.

Ils allaient être précédés dans cette troisième croisade par un monarque plus illustre et plus puissant qu’eux et dont le nom retentissait depuis trente-huit ans déjà en Italie et en Allemagne.

Dès son avènement à l’Empire, Frédéric Barberousse s’était proposé de fonder, hors de l’Allemagne, en faveur de sa maison, une souveraineté absolue. Il fixa les yeux au delà des Alpes, sur ce magnifique pays, tant de fois ravagé et toujours fertile, qui renouvelait constamment ses richesses par un vaste commerce et dont les divisions intérieures favorisaient sans cesse les entreprises ambitieuses. L’Italie n’avait point cessé de former un royaume, réuni depuis Otton le Grand, à la couronne de Germanie. Quoique cette suprématie ne fût pas fictive, celui qui l’exerçait, vivant constamment au delà des monts, n’avait aucune action directe sur le gouvernement de la Péninsule. Ces villes si nombreuses, où le roi n’était représenté que par des comtes, privés eux-mêmes de relations et de liens d’unité, se développaient avec des caractères tranchés qui annulaient l’influence du pouvoir central. En outre, l’édit de 1037, rendu par Konrad le Salique, avaient profondément modifié l’organisation politique et sociale de l’Italie. Les possesseurs de domaines n’avaient plus ni suzeraineté, ni juridiction, et la dernière trace de la grande féodalité avait disparu avec la comtesse Mathilde. Sauf Venise, qui, n’ayant jamais été subjuguée, n’avait point à reconquérir son indépendance, les