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Page:Gosset - Histoire du Moyen-Âge, 1876.djvu/237

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DOUZIÈME SIÈCLE

villes italiennes cherchèrent, dans leurs révolutions communales, moins un nouvel affranchissement que la restauration d’anciennes coutumes. Elles rêvaient de la vieille cité romaine dont elles admiraient la prospérité en confondant volontiers ses époques de grandeur et de décadence, et en mêlant leur amour de la liberté avec leur respect des Césars ou de l’autorité pontificale.

Pise, Amalfi, Naples formèrent des communautés libres quand le reste de l’Europe était courbé sur la glèbe. Les autres villes reconstituèrent leur existence indépendante avec les débris des anciennes constitutions municipales. À peine nées, elles engagèrent la lutte contre les barons voisins et rasèrent les donjons germaniques. Les bourgeois victorieux vécurent dans la cité avec les nobles humiliés, et la guerre entre les deux races s’éternisa sur la place publique. Si on relégua parfois hors des enceintes fortifiées le château menaçant du Teuton, la pensée ne vint à personne de secouer le joug de toute suzeraineté. Ces républiques naissantes voulurent avoir un maître ; les unes le cherchèrent dans l’Empereur, les autres dans l’Église ; elles furent Gibelines ou Guelfes, à l’exception de Venise à qui nul monarque allemand n’osa jamais demander un serment de fidélité. La plupart de ces communes libres, qui furent des États, donnèrent la magistrature suprême à un étranger, le Podestat, choisi généralement parmi les habitants d’une cité amie ; chacun redoutant un concitoyen pour maître.

À Rome, un disciple d’Abélard, le moine Arnaldo de Brescia, hardi, savant, éloquent, se faisait l’instigateur d’un soulèvement populaire contre le clergé. Il ne se contenta pas d’attaquer les mœurs dissolues des prêtres, il soutint qu’ils ne pouvaient posséder et que le temporel devait être séparé du spirituel. Le pape Innocent II, tout en condamnant, dans trente canons, les excès relevés par Arnaldo de Brescia, proscrivit sa doctrine et lança l’excommunication contre lui et ses adhérents. Le peuple, enflammé par les prédications du réformateur, s’assembla au Capitole, chassa le Pape et institua un Sénat de cinquante-six membres, à la tête duquel fut placé