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retraites pour legierement entendre. Et si en laisserons ester atant pour deviser le feu qui est desus l’air en haut.


xvii a[a].
Du feu et des estoiles qui samblent[1] cheoir.

Sus l’air est li feus tout entour. C’est uns airs qui est de moult grant resplendiseur[2] et de moult grant no-[F° 89 d]blece[3] ; et par sa trés grant soutilleté n’a riens de moisteur en lui. Et est autant plus cler de celui que nous avons et de plus soustill[4] nature, comme cis airs est vers yaue clere, ausi[5] comme l’yaue est envers la terre.

Cil airs, ou il n’a nulle moisteur, s’estent jusques a la lune [b] ; et voit l’en souvent desouz[6] cel air aucunes estanceles de feu ; et samble que ce soient[7] estoiles. Dont les genz[8] dient que ce sont estoiles qui s’en vont courant et qui se [F° 90 a] remuent de leur lieus. Mais non sont ; ainz sont aucun feu qui naissent[9] en l’air d’aucune vaspour sache[10][* 1] qui n’a point de moisteur dedenz li qui montée i est de la terre, dont ele naist par le soleill qui l’en trait en haut. Et quant ele est trop haut, si chiet et esprent[11], ausi comme une chandoile[12] ardant ce[13] nous samble ; et puis chiet en l’air moiste, et estaint par la moisteur de l’air. Et quant ele est grosse, et li airs est sés, si s’en vient ar-[F° 90 b]dant tout adès jusques a la[14] terre.

Dont il avient souvent que cil qui vont najant par mer, ou cil qui vont par terre, les ont trouvées maintes foiz et les veoient toutes luisanz et toutes ardanz cheoir jusques a terre. Et quant il venoient la ou ele cheoit pour[15] prendre[16] la, si trouvoient autresi[17] comme cendre, ou comme aucune fueille porrie d’un arbre qui seroit moilliée[18]. Lors s’aparcevoient[19] qu’il ne croient pas bien qui cuidoient [F° 90 c] que ce fussent estoiles. Car les estoiles ne pueent[20] cheoir[c] ; ainz les couvient toutes movoir en leur cercle ordonéement tout adès de nuit et de jours igaument.

  1. * « sache ». Nous conservons cette forme, quoiqu’elle soit isolée dans le manuscrit A, comme elle est confirmée par de nombreux exemples dans d’autres textes (cf. Burguy, III, p. 337). De plus Haase relève ce changement de e en a comme un trait dialectal de la rédaction en vers (Untersuchung über die Reime in der Image du Monde. Halle, 1879).
  1. [F° 89 c90 c = Vers 4006-4051.]
  2. « Sus l’air est li feus... jusques a la lune. » Honorius Aug. I. 65, 67.
  3. « et voit l’en souvent... pueent cheoir. » Honorius Aug. I. 65-67. Philos. Mundi III. 12. Neckam, De laud. I. 329. 315.
  1. — B : samble.
  2. — B : resplendisseur.
  3. — B. noblesce.
  4. — B : soutille.
  5. — B : aussi.
  6. — B : desoz.
  7. — B : soit.
  8. — B : gens.
  9. — B : nassent.
  10. — B : seche.
  11. — B : esprant.
  12. — B : chandoille.
  13. — B, N, C : ardant et ausi comme une estoille ce...
  14. — B : « la » manque.
  15. — B : venoient jusques la ou ele chaoit por.
  16. — A : prende ; B : prendre.
  17. — A : autre ; B : autresi ; C : autresi.
  18. — B : moillie.
  19. — B : apercevoient.
  20. — B : puent.