Page:Goudeau — Dix ans de bohème, 1888.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Entre temps, dans la foule, un cri retentissait :
« Nom de Zeus ! » — Quelque ponte, ayant pondu, gloussait :
« Taille ! taille ! banquier ! « (Tailler ! verbe de proie,
Dont l’optatif futur, gagnerai-je, s’emploie
Avec le verbal neuf, ou huit diminutif ;
Et faire Charlemagne est un infinitif
Dont les pontes présents seront les participes…
Confert Nieburh, passim, Burnouf, premiers principes).
Le ponte Æmilios, pâle, tremblant, séduit,
Comme un chant de sirène écoute tout ce bruit.

Quelques Thessaliens aux puantes cnémides,
Des Argiens subtils drapés dans leurs chlamydes,
Des gens crochus sortis de Sion, des Crêtois
Fuyant le sol natal par-dessus les détroits,
Des athlètes qui n’ont des dieux aucune crainte,
Des filles de Lesbos, des femmes de Corinthe,
De leurs doigts exercés gagnaient les talents d’or
Que des Béotiens livraient au dieu du sort,
Et que, riant tout bas, cueillait la perfidie.
La banque les plumait, ces pigeons d’Arcadie !
Popoï ! Æmilios ne les regardait pas,
Il voyait seulement les vainqueurs des combats,
Et cherchait, pauvre fou ! de l’or en sa ceinture…
Ce temple nébuleux, cette atmosphère impure,
Tout l’excite ! C’est l’or dansant joyeusement !
L’encéphale s’enflamme au simple frottement
De ta roue, ô Fortune !!! Allons ! voici la proie !
Æmilios, debout, s’approche, et, plein de joie,
Lance sur le tapis un disque de métal.
Adieu les chers moutons d’argent : voici l’étal !

Ô grecs dégénérés ! ô fils de Thémistocle !
Si vos aïeux d’airain descendaient de leur socle,