Page:Goudeau — Dix ans de bohème, 1888.djvu/260

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Préparatifs du duel — tous les hydropathes étant dans le secret de la mystification, je pris Camille pour témoin et l’on partagea les autres rôles aux différents membres du phalanstère. La Polonaise faisait de la charpie, et, comme elle était assez souvent prise d’un fou rire, elle prétendit que c’était nerveux. On choisit comme arme le pistolet moyen âge à trente pas. Les témoins décidèrent que la rencontre aurait lieu dans les terrains vagues du Luxembourg, ce qui permettait de dater, sans mensonge, notre procès-verbal de la frontière du Luxembourg. Camille objecta bien que les sergents de ville nous arrêteraient, les autres répondirent qu’on se battrait à minuit ; comme il insistait, redoutant que le bruit n’attirât les représentants de l’autorité, on lui cloua la bouche par une savante dissertation sur l’iodure de liquidium qui fait partir les pistolets sans aucun fracas.

Bref ! pendant que les témoins débattaient les conditions, que la Polonaise effilochait de la charpie, que le Pacha, élevé à la dignité de docteur pour la circonstance, se procurait une trousse, et plaçait entre les branches d’une pince une énorme balle préalablement teintée en rouge, le blanquiste et moi, nous tirions à