Page:Goudeau — Dix ans de bohème, 1888.djvu/34

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nassiens : des images, des allitérations, des rimes riches, pour la forme ; pour le fond, un rassemblement de jolis nuages dans un tunnel. Nous applaudîmes. Le blond svelte, triomphant, exhiba aussitôt une lettre de Victor Hugo, qu’il avait gardée pour la bonne bouche. Le maître lui écrivait : « Toujours en avant, et vers la lumière ! — V. H. »

Ce fut au tour d’Edmond Nodaret, le petit brun. Il lut des vers quasi-classiques : de l’esprit, une forme lâchée, un prosaïsme drôle de chroniqueur débutant, qui sera très amusant plus tard. Quand il eut achevé, il prit dans son portefeuille une lettre que Victor Hugo lui avait adressée et nous en donna connaissance : « Ossa et Pélion ne sont rien, il faut gravir le Parnasse ; vous êtes en chemin. Continuez. — V. H. »

Ce fut à mon tour de prendre la parole. Je me sentais cruellement humilié, devant ces élus du Maître, de ne posséder aucune recommandation. Cela me fit de la peine ! Je me sentis abandonné, dégringolant dans le vide, sans aucune main tendue pour me soutenir.

Néanmoins, bravement impavide, je lus un sonnet néo-grec, où j’essayais de donner la sen-