Page:Goudeau — Dix ans de bohème, 1888.djvu/43

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Eh ! oui ! je savourais la joie bizarre de coudoyer des gens qui se faisaient imprimer dans des gazettes, des êtres à peu près célèbres, au moins de Bullier au Moulin de la Galette. D’ailleurs, à quoi bon eussé-je essayé de me mettre sur le pied de ces Parisiens, là, tout de go ? Lorsque je m’ouvris à l’un d’eux, un soir, de mes projets poétiques, il s’écria avec un nuance de regret :

— Alors, vous n’êtes plus le bon Gascon qui ne fait pas de vers ! Oh ! vous voudriez ressembler aux autres ? Fi ! fi donc !

Ainsi me parla le poète Germain Nouveau, qui, depuis, est devenu peintre. Néanmoins, pour me faire une petite part dans les rêves d’avenir, on décida que je serais auteur dramatique.

Je pris au sérieux ce rôle vague, et me mis à piocher en silence une comédie en vers.

Le surnumérariat ! Et une comédie en vers ! À peine, de temps à autre, un mien oncle m’envoyait-il de frêles subsides qui, tout pareils à des roses, duraient l’espace d’un matin ; hélas ! une morne angoisse me prenait souvent dans cet hôtel garni et suintant, je n’avais point le rire facile entre ces quatre murs solitaires. Aussi