Page:Gouges - Départ de M Necker, 1790.djvu/6

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leurs plus pressans intérêts, et, par-là leur donner une plus mâle existence : moi, au contraire, j’ai voulu conserver leur véritable esprit, déraciner seulement les abus et consolider la monarchie françoise pour le bonheur de tous mes concitoyens ; voilà en quoi nous différons. Cependant nous avons travaillé pour des ingrats ; nous avons perdu tous deux le fruit de nos peines ; voilà en quoi nous nous ressemblons.

Flegmatique par caractère, républicain par naissance, vous êtes venu chez un peuple gai, aimable, fidèle à ses rois, soumis aux loix, pour lui enseigner les élémens d’une liberté qui ne convient nullement à la nature de son gouvernement ; moi, vive comme une languedocienne, et née françoise, connoissant la tête des françois, je leur ai conseillé de ne point toucher à l’arbre antique et sacré de la monarchie, mais d’en élaguer seulement les branches parasytes et gourmandes, et celles qui, arrachées avec tant de violence, n’ont pu qu’entraîner avec leur chûte celle de la France ; voilà où nous différons. Vous avez jugé les ressources de la France inépuisables ; je l’ai cru, ainsi que vous ; voilà où nous nous ressemblons.

L’amour de la gloire a soutenu votre courage ; le patriotisme seul m’a fait affronter tous les