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Page:Gouges - Sera-t-il roi (1791).djvu/14

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PROJET adreſſé à l’Aſſemblée Nationale, le jour
de l’Arreſtation du Roi
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MESSIEURS

L’Europe a les yeux ſur vous, qu’elle les fixe encore ſur vos femmes ; que le départ du Roi, qui devoit allumer partout le flambeau de la diſcorde, & qui, par un effet merveilleux, a changé tout-à-coup la fougue, la frivolité du Peuple François en une ſageſſe, une modération dont aucun Peuple n’a jamais vu d’exemple, nous immortaliſe juſqu’aux ſiècles les plus reculés.

Que le retour de ce Monarque fugitif rapproche les opinions, ramène la concorde ; que, par un de vos ſages Décrets, le Peuple ſoit averti de nouveau de reſpecter ce Prince perfide ou trompé ; hâtez-vous enfin de prononcer en Légiſlateurs François, le jugement qui doit rendre à l’État ſa ſplendeur & ſa tranquillité, & qui en impoſera par ſa ſagacité à nos ennemis & à l’étranger.

Il eſt cependant important de changer la Maiſon de la Reine, de la régénérer entièrement comme le Royaume.

Cette obſervation eſt d’autant plus eſſentielle, qu’il n’eſt plus poſſible de laiſſer à la Reine ſes mêmes entours, comme les ci-devant Ducheſſes, Princeſſes, Marquiſes, &c. qu’il faut ſubſtituer à cette claſſe de femmes eſclaves de leurs vieux préjugés, des Citoyennes actives, zélées pour le bien de la Patrie, auxquelles les grades ne ſeront accordés qu’en vertu du mérite & du patriotiſme ; moi ſeule je peux m’en excepter, je n’ai point un caractère de Cour. Il eſt ſans doute encore néceſſaire pour l’intérêt de cette Reine mal conſeillée, qu’elle n’ait autour d’elle que des femmes en état de lui faire connoître le danger & les moyens de recouvrer l’amour du Peuple. Comme Belle & Bonne, élevée par le premier génie qui a établi en France la