Page:Gounod - Mémoires d’un artiste, 1896, 3e éd.djvu/274

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là, je serais parti ainsi qu’Anna et mes enfants, avec notre mère. Le devoir, représenté par quelques morceaux de pain à gagner, m’enjoint de ne pas partir encore ; mais la première huitaine de mai ne s’achèvera pas sans que nous soyons en route pour aller vous retrouver. Malgré l’accueil très honorable et la situation artistique que mes œuvres m’ont faite ici, je sens que ce pays n’est pas ma France : et comme je suis beaucoup plus humanitaire qu’autre chose, je crois que ma nature et mes habitudes françaises sont trop âgées pour se plier à une transplantation. Je mourrai Français malgré tout. Ce n’est qu’à des temps encore loin de nous, qu’il sera donné de faire prédominer dans l’homme la patrie de la Terre, sur la terre de la Patrie.

Je vous embrasse tous deux du fond du cœur.

                   CHARLES GOUNOD.