Page:Gounod - Mémoires d’un artiste, 1896, 3e éd.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mot ! Pauvre vieux véhicule écroulé, écrasé, broyé sous la vitesse haletante, vertigineuse des roues de fer de la vapeur ! Le voiturin, qui permettait de s’arrêter, de regarder, d’admirer paisiblement tous les sites à travers lesquels — quand ce n’est pas par-dessous lesquels — la rugissante locomotive vous emporte maintenant comme un simple colis, et vous lance à travers l’espace avec la furie d’un bolide ! Le voiturin, qui vous faisait passer, peu à peu, graduellement, discrètement, d’un aspect à un autre, au lieu de cet obus à rails qui vous prend endormis sous le ciel de Paris et vous jette, au réveil, sous celui de l’Orient, sans transition, ni d’esprit ni de température, brutalement, comme une marchandise, à l’anglaise ! Beaucoup, vite et à fond de cale : comme du poisson qu’on expédie par le rapide pour qu’il arrive encore frais !