Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/151

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— Qui sont feu de paille en regard des foudres du ciel, Hans, reprit Alexis, car si tu restes convaincu sans agir dans le sens de ta conviction, tu es mille fois coupable.

— Dieu nous aidera, » fit doucement Michelle, en regardant l’abbé Rozel dans les yeux duquel elle puisa un encouragement.

Quand leurs amis se furent éloignés, Hans s’empressa de s’enfermer dans son bureau. Il n’était pas encore très tard, Michelle voulut le suivre.

« Permettez-moi de lire près de vous, au lieu de rester seule au salon.

— Non, répondit-il doucement ; votre présence me troublerait, le travail que j’ai à faire est sérieux et demande toute mon application.

— Ne pourrai-je vous aider ?

— Ce sont des calculs au-dessus de vos forces. »

Le parti pris était visible, Hans éloignait sa femme à dessein.

Michelle comprit ; reprise de son angoisse, sûrement, elle devait savoir la vérité, se renseigner clairement et réfléchir ensuite à son devoir.

En conséquence, elle se glissa doucement derrière la portière de tapisserie. Elle vit son mari tirer de sa poche son trousseau de clé, ouvrir un tiroir secret, mettre devant lui une petite grille en carton sur une feuille blanche et commencer à écrire.

Soudain, il s’arrêta, leva la tête, regarda vers elle, se leva enfin et venant droit où elle était cachée, il souleva le rideau.

Michelle crut défaillir ; mais il la prit par la main, l’amena dans le cercle lumineux de la lampe.

« Fille d’Ève, » dit-il sans colère.

Et comme elle ne pouvait répondre, étant absolument suffoquée.

« N’ayez aucune crainte avec moi, mon enfant, j’espère qu’il ne s’agit que d’une gaminerie sans conséquence, n’est-ce pas ?

— Vous ne vouliez pas de moi près de vous, j’ai voulu savoir pourquoi, » parvint-elle à dire.