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Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/242

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Nos amis veillèrent tard. Ils ne pouvaient se résoudre à se séparer ; si fraternellement unis, leurs âmes n’avaient qu’une pensée. Ainsi qu’aux premiers siècles, ils auraient voulu courir au martyre.

Vers minuit, à l’heure où ils allaient enfin se séparer, le général devant partir au jour, Max se plaignit d’un peu d’oppression ; la fièvre montait brûlante à son front. Sa mère resta près de lui jusqu’au moment du départ d’Hans. Quand celui-ci pénétra dans cette pièce où la veille ils avaient tous goûté tant de joie, il eut une brusque sensation de deuil. Rita, très fatiguée, s’était assoupie ; Max, l’œil sec et brillant, lui fit signe, désignant un papier sur lequel il avait crayonné pendant la nuit. Et Hans effaré lut :

« Je sens la pneumonie qui menace les blessés convalescents gagner ma poitrine. J’ai devant moi des visions de fin prochaine. Tout me semble rapetissé et terne. Je n’ai pas peur ; je suis chrétien ; je vais mourir.

— Non, fit Hans en se penchant vers lui, tu es mieux, au contraire.

— Ne t’illusionne pas, cousin, et surtout ne me plains pas. Je pars heureux. Dieu me traite en élu, en m’appelant jeune à lui. »

Il cessa d’écrire, une crise d’étouffement le força de se lever.

Rita, anxieuse, accourut ; d’un regard, elle lut les griffonnages de son fils.

Elle pâlit plus encore ; mais aussitôt souriant :