Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/293

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— Ne crains rien, mère, Wilhem ne manque à aucun devoir, c’est un garçon sérieux, tu sais, toujours le premier partout, tandis que moi… C’est un caractère, disait notre professeur.

— Mais qui donc fera prier Frida ?

— Wilhem, mère ; hier matin et avant-hier soir, nous nous sommes réunis tous les trois comme avec toi, et nous avons récité la prière. »

Michelle embrassa son fils. Non, elle n’était pas trop malheureuse, puisque ses enfants étaient pareillement doués !

Quand leur prière fut achevée et qu’ils eurent imploré pour leur journée la divine protection du Très-Haut, Michelle compta sa bourse.

« Hélas ! dit-elle, nous aurons bien juste jusqu’à Belfort, et après ?

— Après, tiens, voici la mienne, dit l’enfant ; vois, il y a là tous les marks que papa me donnait pour mes places, les cent marks que tante Edvig m’avait offerts pour mon jour de naissance et aussi ce que tu y mettais, toi, pour nos promenades.

— Tu nous sauves, fit la mère attendrie, tu as pensé à tout. À présent, nous irons aisément jusqu’à Paris où je gagnerai pour nous deux. »

Ils se rendirent à la gare ; Michelle, toujours inquiète, demanda vite deux billets de seconde classe ; on les lui donna sans même la regarder et enfin elle put s’installer dans le wagon. Heinrich tira de sa poche ses billes, son carnet et s’amusa tranquillement. Quand on cria : Alt Monterol ! la comtesse Hartfeld eut une crispation au cœur. C’était la dernière station allemande. Quelques instants après, l’employé répétait :