Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/54

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« Vous vivez ici toute l’année ? demandait-il, dans cette ruine où filtre le vent de mer, où le froid doit être terrible avec cette misère qui se lit sur vos murs ? Et la petite fée qui court le matin sur les bruyères, est-ce la fille de la marquise ou la vôtre ?

— La mienne, oh ! non, mais je l’aime tout comme. La petite Mouette est la fille de Mme Carlet.

— Qui est-ce Mme Carlet ?

— Cette dame là-bas, qui lit.

— Ah ! et la douairière est la grand-mère, je comprends. Alors, vous ne voyez jamais personne ?

— Ma foi non ; l’hiver, on est des semaines sans passer la poterne, le vent nous jetterait à la mer. Et sauf deux vieux amis de feu M. le marquis, qui habitent Saint Malo, on n’est guère dérangé.

— Quels sont ces deux vieux amis ?

M. de la Rochelandry et M. de Kermoël. Tous deux ne sont guère valides non plus.

— Enfin, comment faites-vous pour vous procurer le nécessaire ?

— Le dimanche, en revenant de la messe, je rapporte les provisions. »

Il s’étonnait. Il était donc possible de vivre ainsi ? Cette fleur sauvage, cette petite Mouette avait poussé dans ce rustique milieu, sans la moindre idée du confortable, sans une gâterie !

Cet intérieur respirait une profonde dé-