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Nadaud. Tu sais Tancrède, l’auteur de la célèbre chanson : « Les deux Gendarmes ? »

— Oui : deux gendarmes un beau dimanche...

— Parfaitement. Eh bien qu’est-il arrivé à Nadaud ?

— Une aventure comique. Napoléon qui venait souvent chez sa cousine Mathilde, trouva un soir Nadaud au nombre des invités. On faisait de la musique. A un moment l’amphitryon pria le gai chansonnier de chanter sa fameuse ballade. Naturellement Nadaud ne pouvait refuser un ordre impérial. Il se mit au piano, déroula les couplets amusants et s’arrêta au dernier.

— Monsieur, lui dit l’empereur en venant près du poëte, il me semble que vous avez sauté une strophe.

Nadaud rougit terriblement, balbutiant :

— Mais non Sire, c’est tout.

— Allons donc, Monsieur, faut-il vous souffler, chantez-nous ce qui manque.

Force fut au malheureux chanteur de s’exécuter. Il se retourna devant le clavier et dit :


J’ai toujours servi sans réplique,
Les Rois et la République
Et l’empereur Napoléon.
Celui-là, je me remémore,
Je l’avais fourré z’en prison.
— Brigadier répondit Pandore,
Brigadier, vous avez raison.


Le pauvre Nadaud cramoisi, ne savait quelle contenance faire, tout le monde restait gêné, mais l’empereur souriant lui tendit la main :

— Sire, excusez-moi... je... je...

— Vous n’avez pas à vous excuser, Monsieur, vous avez donné l’exemple de la plus belle vertu d’un gendarme : l’obéissance.

— L’histoire est exquise, approuva Tancrède. Il y a toujours des anecdotes piquantes dans la vie des souverains. ...

— Et, au besoin on les fabrique, observa l’aïeule, mais celle-ci est bien authentique.

Ils arrivaient à l’église, une file d’autos de luxe stationnait, beaucoup de monde entrait. Mme Consouloudi expliqua :

— On vient entendre la « Passion » avec la belle musique de Bach, chants et chœurs par des amateurs mondains. Le sermon est prononcé par Monseigneur Ajar, évêque de Galilée. Il parle avec une grande éloquence au service de ses convictions. Suivez-moi, mes enfants, j’ai des places au second rang, en haut.