Page:Gourmont - La Belgique littéraire, 1915.djvu/55

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49
ÉMILE VERHAEREN

Il me semble jusqu’à ce jour n’avoir vécu
Que pour mourir et non pour vivre :
Oh ! quels tombeaux creusent les livres
Et que de fronts armés y descendent vaincus !

Ici nous avons un Verhaeren qui découvre la vie et qui se repent, comme tous les poètes d’abord trop intellectuels, trop livresques, de l’avoir découverte trop tard. Je ne voudrais pas dire qu’il y a eu en Verhaeren un changement d’âme. Non, à quelqu’époque qu’on le prenne, c’est bien toujours le même homme. C’est la même fleur, mais d’abord fermée et un peu rébarbative ; ensuite épanouie, éclatante et qui répand les plus riches odeurs. Ses derniers recueils, Multiple Splendeur, Visages de la vie sont remplis des plus beaux vers, qui sont comme des sanglots par quoi l’organisme trop comprimé se distend et se décharge, sanglots