Page:Gourmont - La Culture des idées, 1900, 2e éd.djvu/146

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sente toute nue avec seulement un ruban autour des reins[1]. Exemple admirable de la persévérance du peuple ! Ozanam a parfaitement démontré qu’au moment où, par un coup d’État, le christianisme devint la religion officielle de l’Empire, le paganisme était encore plein de force et de vie ; de là son influence sur la religion nouvelle qui, ne pouvant le détruire, l’absorba sans même le transformer. Cependant, dès les premiers siècles, il y eut dans l’Église un parti très opposé à ce qu’on appelait, sans en comprendre l’importance, les superstitions populaires ; c’était le parti évangélique, qui ne devait entièrement triompher, dans l’Europe du Nord, qu’avec la Réforme[2].

Le culte des saints et des dieux sanctifiés engendra les églises. Les églises catholiques, comme les temples de l’Égypte ancienne, sont des tombeaux ; elles ne furent pas construites en l’honneur de Dieu seul ; leur prétexte fut presque toujours d’abriter le corps d’un bienheureux ou d’un thaumaturge, le simulacre d’une divinité

  1. Dureau de la Malle, Mémoire sur sainte Venise, lu à l’Académie des Inscriptions.
  2. Le paganisme est resté traditionnel, notamment à Paris, dans certaines familles, où, dit-on, les libations et les sacrifices d’animaux sont encore en usage. Mais ceci pourrait bien ne remonter qu’au XVIIIe siècle.