Page:Gourmont - La Culture des idées, 1900, 2e éd.djvu/212

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l’évacuation est fatale. M. Féré, qui n’est pourtant mu par aucune idée religieuse, parle ici comme un bon vieux théologien : « Pour l’individu continent, les pollutions nocturnes constituent une sauvegarde contre la turbulence sexuelle[1] ». Cela, c’est la contrepartie de l’ostentation vertueuse ou de la vertu forcée ; la vertu physiologique, celle qui est la conséquence légitime de la faiblesse des organes, s’épargne du moins de telles « sauvegardes ». On n’agit décemment qu’en conformité avec sa propre nature ; les gens qui veulent agir ou ne pas agir d’après les ordres d’une morale extérieure à leur vérité personnelle finissent, Dieu aidant, dans les compromis les plus saugrenus. Il nous reste à nous demander si, quand on punira de la prison (ou, qui sait, de la mort, car aux grands maux les grands remèdes) les actes sexuels extra conjugaux, il sera permis de se complaire avec le succube. C’est une question que traitent très sérieusement les casuistes, et quelques-uns sont indulgents aux plaisirs qui nous viennent en songe.

La science, qui ne devrait être que la constatation des faits et la recherche des causes, en est arrivée, par impuissance de faire son devoir, à la période législatrice. L’amour libre engendre

  1. L’Instinct sexuel ; évolution et dissolution, p. 301.