Page:Gourmont - La Culture des idées, 1900, 2e éd.djvu/211

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toutes les autres ; car il y a un impératif physiologique et nous n’avons de moyen de lui résister que dans la faiblesse des organes qu’il doit mettre en jeu pour se faire obéir. Cette faiblesse est un signe de décadence organique ; l’impuissance de manger beaucoup peut aller jusqu’à l’incapacité de se nourrir ; c’est la diète, c’est la continence. On s’imagine généralement que les hommes chastes exercent sur leurs désirs une perpétuelle tyrannie ; la continence du clergé est pour les femmes l’exemple d’un martyre incessant. Les femmes se trompent ; non pas qu’elles estiment trop les plaisirs dont elles disposent ; mais, et cela ne leur est pas particulier, elles prennent ici la cause pour l’effet ; elles renversent les termes tels qu’ils se posent dans le thème d’une bonne logique.

L’homme qui, de son plein gré, se voue à la continence, c’est qu’il est glacé. Voilà la vérité. Et la femme qui entre volontairement dans un couvent, elle affirme la nullité de ses désirs charnels. Leur chasteté est un état physiologique et qui, en général, ne comporte pas plus l’idée de vertu que, chez un vieillard, la frigidité. Il y a ou il n’y a pas désir et, hors les cas où il n’est que morbide, le désir se résout en acte. Cela est particulièrement impérieux dans la sexualité ;