Page:Gourmont - La Culture des idées, 1900, 2e éd.djvu/309

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est plus vaste qu’au dernier siècle ; s’il est moins profond, c’est qu’il n’a plus pour appui la suprématie militaire. De tous les commerces allemands c’est celui de Leipzig qui a le plus gagné, peut-être, au traité de Francfort. Il n’a tenu qu’au génie littéraire allemand de profiter de la situation. C’est parce qu’il s’est obstiné à se taire ou parce qu’il n’a parlé qu’avec timidité que les lettres françaises ont maintenu et peut-être étendu leur vieille domination. Sans ce pacifique empire d’outre-frontières, la vraie littérature de France, et toutes les industries qu’elle fait vivre, n’existerait peut-être plus. Qu’il le veuille ou non, un écrivain français a trois clientèles dont voici l’importance décroissante : Paris, l’Étranger, la Province. Il faut donc distinguer de l’influence littéraire l’influence purement linguistique qui s’exerce par la politique et par le commerce. Les livres français sont lus par des hommes qui ne sauraient parler notre langue ; ils l’ont apprise ainsi qu’une langue classique, langue de luxe et de loisirs aristocratiques. D’autre part les Français de France ne lisent qu’en eux-mêmes ; ce livre unique et quelques fausses nouvelles, voilà tout l’aliment que se permet leur génie égoïste et national.

Pour propager la littérature française à l’étranger, il suffit que nous écrivions de bons livres dans