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Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/112

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je dirais que je perçois dans ce bruit des harmoniques métaphysiques, et, à la surface, la perpétuelle lueur des idées que charrie la rivière.

Quelle qu’en soit la cause, il y a un grand charme dans tous les écrits de M. Mauclair, qui sont déjà très variés et prouvent une fécondité exceptionnelle. Tout jeune encore, plus jeune même qu’on ne le supposerait raisonnablement, il se veut, non le mentor, sans doute, mais le frère aîné et le conseiller indulgent de la Jeunesse ; cette charge lui convient, mais il l’exercera mieux quand son intelligence, moins avide de toutes les idées, de toutes les fleurs, se tiendra plus volontiers dans la forteresse de la ruche. Mais n’est-il pas surprenant qu’il parle avec maîtrise, à l’âge où d’autres savent à peine écouter, et qu’on ne l’ait jamais connu écolier, et que son premier livre, Eleusis, soit aussi substantiel que l’Orient vierge, qui paraissait naguère ? Le secret de ce prestige et de cette autorité, je le trouve peut-être dans cet aveu : « Je me préoccupe de me donner tout entier à toute minute de ma vie… », et dans cet autre : « … en m’offrant aux variations sensitives de la minute qui va venir… »