Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/136

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qui peut varier selon les lectures ou selon l’heure des lectures ; ainsi, il m’a semblé que la misère dont souffrait Babylas est la misère de l’isolement par timidité sentimentale : et alors le grotesque gnome devient un être humain et sa timidité en fait un frère de l’orgueilleux. Le même mal peut tourmenter l’humble victime qui a peur et le superbe qui dédaigne d’avouer son désir.

On pouvait, après ce premier livre, attendre une suite d’études dans le même ton de sincérité et de détachement ; l’ironie sans doute se serait accentuée et, portant sur des faits plus généraux, aurait donné aux analyses une force plus convaincante. Il n’est rien de durable sans l’ironie ; tous les romans de jadis qui se lisent encore, le Satyricon et Don Quichotte, l’Âne d’or et Pantagruel se sont conservés dans le sel de l’ironie. Ironie ou poésie ; hors de là, tout est fadeur et platitude. Peut-être ne saurons-nous jamais si M. Vallette eût manié supérieurement ce don, mais nous savons qu’il le possède : en écrivant de littérature, il faut regretter que la Vie soit intervenue et, d’un geste un peu satanique, ait renversé l’encrier sur la page commencée.

Mais il n’y a pas d’activités inférieures en soi,