Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/196

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

syllabes appartenant par leur son à cette famille d’idées ; soit de faire courir sous l’idée exprimée par les mots un sens contradictoire ou atténué, en choisissant ses mots dans une série instrumentale différente.

C’est fort ingénieux. Mais, si le principe de l’instrumentation verbale peut s’expliquer et peut se comprendre, il ne peut être ni senti ni même perçu, le long de l’œuvre du poète, par un lecteur même prévenu et de très bonne volonté. Si je vois les U en noir et les O en jaune, tout l’orchestre coloré de M. Ghil jouera faux pour mon imagination visuelle, et l’r et l’o, au lieu de sonner comme des cuivres glorieux, me donneront, si on les joint, l’ingénuité des petites flûtes.


Il ne veut pas dormir, mon enfant…
Il ne veut pas dormir, mon enfant…mon enfant
ne veut dormir, et rit ! et tend à la lumière
le hasard agrippant et l’unité première
de son geste ingénu qui ne se sait porteur
des soirs d’Hérédités, — et tend à la lumière
ronde du haut soleil son geste triomphant
d’être du monde !…


Ces vers simples et clairs donneraient, selon M. Ghil, une succession de tons dont les premiers