Page:Gourmont - Lettres à Sixtine, 1921.djvu/139

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renoncé qu’en apparence et que, te disant certaines choses, un soir, dans le petit jardin de la rue de la Planche, je ne parlais pas en l’air. Ta fierté m’est aussi chère qu’à toi et sois sûre, quoi que je fasse, qu’elle n’aura jamais la moindre atteinte à souffrir.

Est-ce que cela ne se peut écrire ces idées particulières qui te hantent et t’attristent encore ? Pour moi, je ne vois rien au delà de ces quinze jours, qu’un ennui cette année, un ennui et annuel. Pourquoi songer à ce que nous deviendrions l’un sans l’autre ? En somme, c’est songer à la mort, méditation vaine et dangereuse : il faut vivre comme si on ne devait jamais mourir. Ne sois point indifférente à ta santé, mon amie ; veille à tes forces, fais-le pour moi et surmonte une répugnance à manger seule dont tu finirais par souffrir.

Ayant naturellement l’esprit très pessimiste,