Page:Gourmont - Lettres à Sixtine, 1921.djvu/160

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toi aujourd’hui. Je fus à la messe ce matin, il y avait de l’orgue et toute notre vie dans les églises a surgi devant moi, depuis ce vendredi du Stabat jusqu’au jour des jacynthes.

Le creux de sable où je suis étendu se peuple de ta forme ; tu sors de l’eau ruisselante, étincelante au soleil, comme Astarté, ou tu t’allonges sur la dune, le vent couvrant de sable menu ta peau ivoirée.

Mes sens s’irritent ; d’ailleurs, je suis un peu énervé ; je dors fort mal ; passant tous mes rêves avec toi, ce qui n’est pas calmant du tout.

Cette solitude de la mer est terrible ; en deux heures on est las d’esprit, sans autre lucidité que des sensations lancinantes ; toute l’âme est chair. Ceux qui trouvent que ça élève l’âme à Dieu n’ont pas le crâne fait comme moi ; à Trouville, peut-être, à cause du casino, mais pas à Geffosses, où je suis la seule nature respirante, en face