Page:Gourmont - Muses d’aujourd’hui, 1910, 3e éd.djvu/138

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Sous ta robe, qui glisse en un frôlement d’aile,
Je devine ton corps, — les lys ardents des seins,
L’or blême de l’aisselle,
Les flancs doux et fleuris, les jambes d’Immortelle,
Le velouté du ventre et la rondeur des reins.
…Voici la nuit d’amour depuis longtemps promise…
Dans l’ombre je te vois divinement pâlir.

Cette poésie est beaucoup plus mystique que sensuelle ; parfois aussi, dans ces chants, on ne distingue pas la spécialité de l’inspiration : il y a là des poèmes qu’un amant pourrait réciter à son amante ; il nous faut, pour restituer à cette poésie la perversité qu’elle exige, imaginativement mêler une double chevelure, écraser les pommes jumelles des seins, joindre les bouches aux lèvres et les lèvres aux bouches, évoquer l’accord odoral des chairs brunes et blondes des femmes : la mer et la forêt ; les algues, le muguet, la rose et la framboise.

Si, en lisant les poèmes de Renée Vivien, on