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L’HEURE

Voici l’inévitable et terrible moment
Où mon destin s’écrit inévitablement.
Une muette horreur m’envahit et m’accable.
Devant le calme front de l’Heure inévitable,
Il ne me reste plus l’élan d’un jeune espoir…
Sans force et sans ardeur, je m’abandonne au soir.
Je n’attends plus le luth ni la musicienne
Ni le jour glorieux… Ah ! que la fin survienne…

Elle à qui la gloire avait souri, confiait-elle à ses amies, « puisque ma gloire est de vous avoir adorées, » voici que, dans son désespoir, elle renie jusqu’à ses amours. Mais lorsqu’on parlera de Renée Vivien, il faudra oublier ce blasphème des dernières heures, pour ne se souvenir que de la beauté de son chant d’amour.

……Mon cœur est las enfin des mauvaises amours
Des songes de mes nuits et des maux de mes jours ;
Mon cœur est vieux autant qu’un très ancien grimoire,
Et, désespérément, j’appelle l’Heure Noire.