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jane catulle mendès

au pied de purs autels ». Elle cueille les lys, « parce qu’ils sont plus blancs que la clarté du jour », et les emporte dans ses bras :

Autour d’elle et des fleurs s’épaissit la buée
Et la grosse chaleur des parfums amollis,
Et longtemps, l’espéreuse adore, exténuée,
Le mal du rêve vain et de l’odeur des lys.

Les lys, comme les jeunes filles dont ils symbolisent l’innocence, enferment l’odeur de l’amour. Elle écoute :

Au dehors le jardin et le grêle tumulte
Est une sérénade au balcon déserté,
Et la pièce fermée où le silence exulte
S’emplit de frissons lents et de mysticité.

Mais cette orchestration d’odeurs et de couleurs, ce silence mystique où elle se développe, ne font que préciser le seul désir vivant au cœur des jeunes filles : l’amour. Elle l’attend ; elle sait qu’il va venir, et c’est une peur délicieuse : « Un jour il sera là. »