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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/130

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qui n’est que relatif, c’est-à-dire le fond même de la vie. »

Il ne faut pas avoir le mirage de l’absolu ; c’est en effet un grand malheur, et une affection qui peut aller jusqu’à corrompre la raison, puisqu’elle affaiblit la sensibilité.

Pessimiste avoué, M. Thiaudière a tenu à donner une définition de sa philosophie : « Qu’est-ce qu’un pessimiste ? C’est un homme absolument dégoûté : — en philosophie, de toutes les doctrines ; — en politique, de tous les partis ; — en littérature, de toutes les écoles ; — en anthropologie, de tous les hommes et de lui-même ; — en amour, de toutes les femmes ; — en religion, de tous les dieux. » Nous voilà renseignés, non peut-être sur le pessimisme lui-même, mais du moins sur la signification que l’auteur donne à son mot favori. Il est dégoûté de tout, et il va chercher à nous en dégoûter nous-même.

Il dira, de l’amitié, par exemple : « Il n’est pas rare de voir deux anciens amis se traiter mutuellement de canaille, mais il est rare qu’ils n’aient pas raison tous les deux » ; de la gratitude : « Il y a des gens capables de gratitude, mais, par malheur, ce n’est presque jamais ceux-là que nous obligeons » ;