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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/161

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assombris par l’expérience qui ne s’égaie qu’aux enfantillages. Aussi de menues pratiques superstitieuses aident à supporter les journées[1].

« Il faut qu’elle boive à chaque source qu’elle rencontre sur son chemin.

« — C’est toujours une nouvelle saveur, me dit-elle, et elle boit de préférence dans le creux de sa niain, bien qu’elle ait toujours sur elle un gobelet d’or. »

Et cela par manière de communion avec la nature, avec la croyance de célébrer de mystérieuses noces.

Il semble aussi qu’elle ait cru à la métempsychose[2].

Voilà des contradictions et des faiblesses ; et cela est heureux, cela certifie la vie. Un être tout uni se lit trop bien et trop vite : mauvais signe.

Les beaux exemplaires de l’humanité ne sont jamais des produits bruts de la nature. Ce sont des œuvres d’art, façonnées par la volonté en lutte avec l’instinct. Mais il ne faut pas que l’instinct soit vaincu et chassé ; il faut qu’on le retrouve, comme l’or dans le métal de Corinthe.

1900.
  1. Page 256.
  2. Page 111 et (page 187) le mot soudain interrompu : « Quand je reviendrai sur la terre... »