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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/160

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parfois besoin de se reprendre ou de se contredire. C’est très féminin ; mais une femme supérieure n’en est que davantage une femme.

C’est d’une femme qu’il s’agit. Supérieure et différente, solitaire et dédaigneuse, l’impératrice a toujours possédé, et jusqu’à sa dernière heure, les dons les plus exquis de cet état. Elle fut jolie, avec de la beauté dans l’attitude, dans les yeux ; elle fut gracieuse et prenante, malgré elle, parce que l’inconscient féminin était plus fort que sa volonté d’isolement. Son intelligence s’adaptait à la causerie, comme au rêve ou à la méditation ; elle avait de l’esprit, et du plus vif. Enfin la bonté fit souvent, en cette âme complexe, capituler le mépris.

Rien de plus charmant que sa visite à la villa Capo d’Istria[1], l’étonnement religieux de la jeune fille (« Vous êtes la reine ! »), la branche chargée de fleurs et d’oranges mûres. L’impératrice était capable de jouir des plaisirs les plus simples, peut-être parce que sa vraie vie alors fuyait : or Le sentiment du temps est toujours douloureux, car il nous donne le sentiment de la vie[2]. »

Il y a un certain sérieux dans les caractères

  1. Page 260.
  2. Page 146.