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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/167

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Ce Philinte, en somme, n’a plus qu’un intérêt historique ; c’est un document pour la psychologie révolutionnaire ; et cela n’a rien à faire, ou bien peu de chose, dans le tableau de la littérature française. Philinte et les autres comédies de Fabre d’Églantine, telles que le Convalescent de qualité, ce sont des pièces de circonstance ; on y cherche un reflet de l’état des mœurs, un écho des opinions en ces temps troublés ; si l’on y cherchait un peu de beauté, un peu de rêve, quelque philosophie, on serait déçu.

C’est un des plus grands malheurs de ces époques tragiques, que l’art lui-même y devient temporaire ; il croit faire du nouveau, en faisant de l’actualité, et il ne crée que de la mort. A peine ses enfants ont-ils poussé un cri, pour annoncer leur naissance, qu’ils sont déjà froids et raidis.

Lorsque Fabre d’Eglantine faisait jouer son Philinte, il était déjà, plutôt qu’un poète, un homme politique. Lié avec Danton et d’autres hommes de ce parti, il avait subi la contagion de leurs violences ; il partageait leurs préjugés, leurs audacieuses ambitions ; il communiait avec leurs haines. Pendant quelque temps, cette fraternité lui fut utile. On joua ses pièces un peu partout, en province,