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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/309

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d’hui oserait dire qu’il préfère à la beauté glaciale et trop majestueuse de la Vénus de Milo la beauté souple, menue et rieuse de la femme de l’Ile-de-France ? Laclos, sur cette question, retrouve un peu de son bon sens de Français du xviiie siècle ; il se rapproche de Voltaire et nous retrouvons un peu de l’esprit du spirituel romancier.

La femme naturelle ! Pourquoi aller la chercher si loin ? La femme est toujours naturelle, ici ou là, à Paris ou en Guinée. La civilisation est un produit naturel, tout comme l’état sauvage ; ce sont des fleurs différentes poussées dans la même forêt.

Si l’on admettait, pour un instant, la division des choses en naturelles et artificielles, ce ne devrait être que pour considérer, avec le plus grand respect, l’artificiel comme un perfectionnement de la nature. C’est même le seul mobile des multiples activités humaines : perfectionner la nature, c’est-à-dire la recréer perpétuellement, la façonner à notre fantaisie et, en même temps, tirer de son sein inépuisable des aliments toujours nouveaux pour nos besoins et nos curiosités.