s’émousse chez les juges les plus difficiles. M. Faguet, lui-même, perd la tête et se récite à lui-même une poésie pour laquelle, professeur, il mettrait en pénitence l’élève qui s’en serait rendu coupable.
Le mécanisme psychologique de ces aberrations est très curieux, quoique très simple. Il est basé sur la paresse intellectuelle. Un poète a écrit de très jolis vers, c’est le cas de M. Rostand ; on en est ravi, et plus, on en est ivre ; on place très haut l’auteur dans son estime et dans son amour. Il se fait dans l’esprit cette cristallisation par laquelle Stendhal expliquait la naissance obscure des passions et des caprices. C’est fini ; le charme a opéré. Tout ce que ce poète écrira désormais sera admirable. Nous voilà rassurés. Le point est hors de litige. Occupons-nous d’autre chose. M. Rostand est jugé une fois pour toutes ; il ne nous reste plus qu’à l’admirer sans réserve et sans choix.
Maintenant, comment se fait cette cristallisation ? On n’en sait rien. Sait-on comment naît l’amour, ce qui transforme pour nous en la plus adorable des princesses, la femme qui, le jour d’avant, nous était indifférente ? M. Rostand est célèbre ; il est illustre : il pourrait fort bien ne pas l’être. Il a eu du bonheur, et voilà tout. En effet, M. Maeter-