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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér2, 1913.djvu/11

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de son vivant, trois cents francs. On payait, en ce temps-là, dans les journaux.

Son esprit, comme celui de presque tous les hommes d’esprit, était du bas de l’escalier. Alors, il levait le doigt et disait le mot trouvé trop tard. M. M…, quoique plus jeune que lui, l’effrayait beaucoup et il ne trouvait jamais rien de très piquant à lui répondre. Il admirait profondément en lui cet art de gagner l’argent, de jouer avec la vie, cette maîtrise dans les affaires, et il me conta avec bonheur l’histoire de la fondation de l’E… de P…, M. M. allongeant le bras vers les billets de banque étalés, en distrayant quelques-uns et disant ce seul mot :

— Dix pour cent, n’est-ce pas ?

Un soir nous étions assis à la terrasse d’un café, près du passage des Princes. M. M. vint à passer. Bans sa hâte à l’aller saluer, Villiers renversa et brisa deux ou trois verres. En revenant, il me dit

— Voilà un homme étonnant. Il est capable de tout !

Parfois, quand il méprisait beaucoup un écrivain, un poète à la mode, si son nom venait à être