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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér2, 1913.djvu/15

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Après dîner, il voulut nous verser sur les doigts des gouttes d’essence de violettes. Il disait, et cela nous faisait bien sourire :

— C’est l’usage de la maison. »

Il était surpris que M. B… eût écrit dans un de ses romans une assez curieuse et poignante scène d’amour. Il la retrouva dans Dostoiewsky et fut rassuré. Il disait du même B… : « Il déshonore la pauvreté. »

18 août 89. — Aux frères Saint-Jean-de-Dieu. Une petite chambre très propre avec une grande fenêtre ouvrant sur un jardin éclatant de fleurs rouges. Villiers est là, couché. Dans un corps d’une maigreur effroyable, les yeux seuls vivent faiblement. D’une voix presque basse ; il me dit quelques mots, et j’ai un remords de le laisser parler, tant le souffle lui est pénible. On dirait qu’il n’a plus de dents.

Il veut guérir, mais il sait que demain sera peut-être son dernier jour. Sur un signe, je me penche vers lui, et il me dit (comme je venais de lui parler, du Meilleur Amour, paru quelques jours avant dans le Figaro) :