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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/180

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sants, mais dit à chacun : « Vous le savez mieux que moi… » Le vilain Babouin est celui qui vu devant Notre-Dame à Paris, regarde les rois et dit : « Voilà Pépin, voilà Charlemagne ! » et on lui coupe sa bourse par derrière…[1]. »

Les vilains de Champcenetz sont de toutes classes. Voici le gobe-mouche politique, celui qui surveille l’Europe ; nulle question internationale ne lui est étrangère : « Par l’étendue de ses connaissances, il est très redoutable dans un cercle. » Le gobe-mouche législateur réserve son attention pour la France ; il est patriote. Il gouverne : il se lève pour gouverner et s’endort en gouvernant[2]. Ces deux espèces, mais la seconde surtout, joueront un grand rôle à la Révolution ; ils la feront, car elle ne se serait pas faite sans eux. Le gobe-mouche militaire « rêve de tactique jusque dans les bras de sa maîtresse. Toutes ses actions sont des manœuvres ». Le gobe-mouche espion, que Chamfort a peint par des anecdotes[3], et Rivarol par un dialogue[4]. Champcenetz le montre résigné à tout,

  1. Des XXIII Manières de Vilains, pièce du xiiie siècle, publiée par Achille Jubinal ; 1834.
  2. Cf. Rivarol, Petit Dictionnaire des Grands Hommes de la Révolution : De Croix, un des muets de l’Assemblée… Il est dévoué à la bonne cause, il se lève pour la bonne cause, il reste assis pour la bonne cause, il tape du pied pour la bonne cause… »
  3. Les Plus belles Pages de Chamfort, 8, 45, etc.
  4. Dialogue des morts imité de Lucien, dans les Plus belles Pages de Rivarol, livre II.