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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/412

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continua don José. Mais je les comprends, j’ai été joueur. Chez eux, toutes les fonctions publiques, sans aucune exception, sont tirées au sort……

— C’est la vraie démocratie, cela. Les Athéniens…

— Et ce n’est pas si bête. Je vois de près les élections populaires ; j’ai mis la main à plus d’une depuis dix ans, j’ai conduit au vote des troupes de gauchos comme ils conduisent au pâturage des troupes de bœufs. On se donne bien du mal pour faire le travail d’une de ces roues que j’ai vues à Rosario tirer une loterie. Chez nous, le suffrage populaire ne se totalise jamais sur le plus capable. La multitude choisit un homme à son image, un peu intelligent et un peu bête, un peu honnête et un peu coquin, un homme comme on en ferait un avec des morceaux pris à chacun des électeurs…

— Tandis que chez les Aventurins le Sort, qui ne choisit pas, peut élire l’Intelligence, quelquefois. Sans doute. On pourrait espérer de vivre sous une série heureuse…

Nous arrivions à San Juan. J’y trouvai des nouvelles qui me rappelaient. Je n’ai pas vu la République Aventurine.