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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/58

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S’il entame ensuite l’éloge attendri du bon curé de campagne, c’est pour finir sur ce trait que, grâce à la persécution qu’a subie le bas clergé, aimé de ses ouailles, il est à présumer que le christianisme « durera quelques années de plus qu’il n’aurait fait dans le calme ». Il est condamné partout, sauf peut-être en Espagne, où la bassesse du sacerdoce n’a d’égale que l’abrutissement du peupie, sauf peut-être en Allemagne, pays éminemment religieux. En Italie, la fin du christianisme est très prochaine : « La multiplicité des sectes monastiques en Italie sert à y nourrir la superstition. Qui croirait qu’à la fin du xviiie siècle les nobles de Rome font encore des pèlerinages, pieds nus et la hart au cou, pour racheter le pardon d’un assassinat ? Mais comme les contraires existent toujours l’un près de l’autre, il suit de cette crédulité que les liens de la religion sont aussi plus près de se rompre. De tous les temps, les Italiens furent divisés en deux sectes, l’une athée, l’autre superstitieuse ; voisins des abus et des vices de la cour de Rome, c’est nécessairement le résultat de leur position locale. La dégénération du caractère moral, plus avancée en Italie que dans le reste de l’Europe, y accélérera aussi la chute du christianisme[1]. »

  1. Essai, p. 661.